Editorial. Ce numéro de la revue “Recherche Sociale” porte sur les mutations de la famille contemporaine envisagées sous l’angle d’un phénomène nouveau, celui de la résidence en alternance des enfants de couples séparés. Ce mode de garde encore peu répandu, qui consiste à partager la résidence de l’enfant chez chacun de ses parents à l’issue d’un divorce ou d’une séparation, signe sans doute la mise en actes du principe récent de “coparentalité” défendant un égal investissement du père et de la mère auprès des enfants, par delà les aléas de la vie conjugale.
Avant-gardiste et significative d’une nouvelle manière de concevoir les rôles maternels et paternels pour certains, conçue par d’autres comme un danger pour l’équilibre et le bien-être des enfants, la résidence alternée suscite, depuis son officialisation il a quelques années, des débats enflammés. Au-delà de ces controverses, force est de constater que cette pratique nouvelle interroge de manière très concrète les acteurs en charge des politiques sociales et familiales. Phénomène émergent – et peut-être amené à se généraliser ? -, elle oblige en effet à revoir le système de calcul et de répartition de toute une série de prestations aujourd’hui attribuées sur le principe de la résidence permanente des enfants au foyer de l’un ou de leurs deux parents. Finalement, si la circulation des enfants entre deux foyers et le partage de leur temps auprès de deux parents séparés donne matière à débattre aux psychologues et aux pédopsychiatres, c’est également un défi pour les juristes, les services fiscaux et les organismes à l’origine du versement des prestations familiales…
C’est pour cette raison que la Caisse d’Allocations familiales a commandé à FORS – Recherche Sociale, en 2007, une étude portant sur les modalités d’organisation de la résidence alternée, l’idée étant de s’extraire des polémiques et autres jugements normatifs afin d’apporter un éclairage précis sur le vécu des parents concernés, leurs pratiques et leurs difficultés quotidiennes. Les travaux présentés dans ce numéro reprennent les réflexions et constats issus de cette étude. Cette dernière met une fois encore en relief, s’il était besoin de le démontrer, que les mutations et les formes nouvelles de “l’institution” familiale interrogent en profondeur les cadres juridiques et sociaux existants, incitant l’Etat et les institutions publiques à réévaluer en permanence leurs modalités d’intervention auprès des familles. – Florence BRUNET